Fleurs de prIntemps

En ces temps punitifs de confinement sanitaire, les jours de beau temps dont notre région bénéficie actuellement n’ont pas la même saveur de liberté, quoique la faible densité de population des montagnes nous expose moins à une éventuelle contamination.

C’est une époque où, la floraison printanière éclatant partout dans les jardins, les chemins et les bois, il n’y a pas à aller bien loin pour contempler les fleurs colorées qui ornent la nature renaissante. En voici quelques unes, avec leurs noms savants, vulgaires, botaniques ou locaux, et leur usage, afin que vous puissiez les identifier, et compléter vos connaissances sur ces compagnes éphémères mais fidèles de nos jours.

La bruyère arborescente, erica arborea, famille des ericaceae, très commune, en association avec les arbousiers dans le maquis, fournissait les habitants en branche pour les balais et en bois pour le travail des artisans pipiers. Elle porte en Corse le nom de scopa, qui désigne aussi bien la plante que l’ustensile fabriqué avec ses branches. Ses fleurs au printemps sont très mellifères.
L’asphodèle (nom masculin), asphodelus microcarpus, famille des liliaceae, pousse partout le long des routes et chemins, sur les talus, et dresse haut ses hampes florales blanches et lumineuses comme des candélabres. Le champ des asphodèles est le séjour des âmes ni bonnes ni mauvaises dans la mythologie grecque antique, un des trois lieux des Enfers avec les Champs Elysées et le Tartare. les asphodèles fournissaient une nourriture de substitution à nos ancêtres pendant les temps de disette, des torches précaires que l’on faisait brûler à la Toussaint près des tombeaux, ainsi que des allume-feux. Il porte de nombreux noms, comme arbucciu, talavellu, luminellu, candellu, témoignant de la haute valeur symbolique de cette plante dans la culture corse.
L’ellébore (nom masculin) de Corse, helleborus argutifolius, sous-espèce corsicus, famille des ranunculaceae, épanouit ses fleurs vertes à la fin de l’hiver. Il est si fréquent ici que d’aucuns pensent que c’est son appellation corse, a nucca, qui aurait donné son nom à notre commune, Nocario. C’est une plante toxique dont l’action sur le système nerveux la faisait considérer apte à guérir de la folie. Ainsi le lièvre de la fable dit à la tortue qui veut le défier à la course :      « Ma commère, il vous faut  purger Avec quatre grains d’ellébore. »
La violette, viola corsica, famille des violaceae, réputée timide et discrète, égaye la mousse le long des sentiers, et dispense un parfum aussi délicat que fugace. A viuletta corsa est une espèce endémique qui n’existe nulle part ailleurs. Outre ses vertus médicinales pour les affections broncho-pulmonaires (personne ne l’a encore signalée pour le coronavirus), elle ferait partie des parfums de sainteté qu’exhalaient le corps des saints, même après leur mort.
La pâquerette, bellis perennis, famille des asteraceae, s’épanouit dans les gazons, en rompant la monotonie verte de l’herbe par ses petites fleurs composées aux couleurs du Vatican. Symbole du printemps par excellence, elle éveille en nous la joie du renouveau. En langue corse, on l’appelle pratellina, mais aussi fiore di curona, sans doute parce qu’elle composait la couronne dont les jeunes filles ornaient leur tête au printemps. Il existe une espèce endémique appelée fausse pâquerette, à feuilles en forme de spatules (bellium bellidioides). La pâquerette est comestible, et possède des vertus thérapeutiques. Elle se ferme la nuit. « Ce mécanisme est appelé nyctinastie (mouvement lié à la nuit). Il permet surtout à la pâquerette de protéger ses organes reproducteurs du froid nocturne, des pluies violentes et, au passage, des assauts de gastéropodes. » (https://lespiedsdanslasalade.org/2019/07/01/la-paquerette/)
Le lamier pourpre (Lamium purpureum) ou ortie rouge, de la famille des lamiaceae) est une plante très commune, plutôt considérée comme une mauvaise herbe, c’est pourtant une plante comestible à la saveur agréable qui peut agrémenter soupes et salades.
L’ornithogale de Corse (ornithogalum exscapum sous espéce sandalioticum) de la famille des asparagaceae, est endémique et rare. Il pousse dans les pelouses d’herbe rase. Ce spécimen a été photographié au pied de l’escalier de Patrick Alessandri.
Les petites fleurs du géranium à feuilles rondes (Geranium rotundifolium) de la famille des geraniaceae, sont très discrètes au bord des chemins, mais participent aussi à la beauté de la floraison printanière. À chaque échancrure des feuilles, une petite tache rouge est caractéristique de l’espèce.
Le genêt à balais (cytisus scoparius), famille des fabaceae, orne d’un jaune d’or le bord des chemins de la châtaigneraie, et parfume le maquis et les sous-bois jusqu’au mois de juillet. Son nom corse est « a cora », bien que ce vocable ne soit pas fréquemment employé dans notre hameau. Comme avec la bruyère, on utilisait ses tiges séchées pour faire des balais, d’où son nom. Les abeilles qui butinent cette plante mellifère rentrent à la ruche toutes jaunes de son pollen.
Le bec-de-grue musqué, erodium moschatum, appartient à la famille des geraniaceae, elle fleurit d’avril à septembre. Petite fleur qui égaye la verdure.
Le cyclamen de Corse, Cyclamen repandum, est une plante de sous-bois qui fleurit au printemps (avril – mai). Ses fleurs carminées, très rarement blanches (f. album), à base plus foncée sont odorantes. Elles ont des pétales élancés, dont l’extrémité est élégamment contournée. Les feuilles sont larges et souvent marbrées, avec une bordure fortement dentée ou lobée, et ressemblent quelque peu à celles du lierre.
Le muscari à toupet, muscari comosum, famille des asparagaceae, est très commun dans les friches et rocailles du midi et de la Corse. Très attractif pour les abeilles, son toupet violet est très décoratif. Son nom corse est « u purrione », d’après le site https://www.balogna.sitew.com/
Très fréquent dans les anfractuosités des vieux murs, le nombril de Vénus, Umbilicus rupestris, famille des crassulaceae, est appelé ainsi à cause de sa forme caractéristique. L’adjectif latin « rupestris » de ripa (mur, mot identique en corse) indique bien ses lieux de prédilection. Les feuilles sont comestibles en dehors de la saison estivales, un peu comme le pourpier. Pour nos anciens, cette plante avait des vertus thérapeutiques (une fois la cuticule inférieure enlevée, on l’appliquait sur les plaies et brûlures) et domestiques (pour éviter aux poêles d’attacher). Son nom corse est « a bricciucola ».
Très semblable au pissenlit, l’hyoséride rayonnante, hyoséris radiata, famille des asteraceae, pousse en abondance au printemps dans les chemins, sur les talus, en plein soleil. On l’appelle aussi chicorée rayonnante ou chicorée de porc. Sa couleur jaune rend nos chemins heureux sous le soleil printanier.

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